Comme à chaque fois depuis 2011, l’année où il comptait encore quatre coups d’avance à mi-parcours le dimanche, on se croit à rêver à la victoire de Rory McIlroy, incontestablement le chouchou du public, même ici à Augusta, en terre américaine. 2025 sera-t-elle, enfin, l’année du Nord-Irlandais ?
L.V., à Augusta
Est-ce enfin la bonne ? Est-ce enfin l’année de Rory McIlroy ? Celle où il parviendra enfin à boucler son Grand Chelem en carrière, rejoignant ici les cinq monstres sacrés ayant réussi cet exploit : Gene Sarazen, Ben Hogan, Jack Nicklaus, Gary Player et Tiger Woods ? Un objectif qu’il traîne presque comme un boulet depuis son succès en juillet 2014, à The Open, au Royal Liverpool. Depuis, et malgré une seconde victoire au PGA Championship un mois plus tard dans le Kentucky, le Nord-Irlandais a toujours échoué dans sa quête de cette fameuse veste verte qui continue à se refuser à lui. Année après année.
Et pourtant, ses prestations à Augusta ont très souvent été excellentes. En seize apparitions, sans la moindre interruption depuis 2009, Rory McIlroy a ainsi franchi treize fois le cut, finissant sept fois dans le top 10, quatre fois dans un top 5. En 2022, il s’était même offert son tour le plus bas. Un 64 (-8) lors du 4e tour, insuffisant néanmoins pour battre Scottie Scheffler. Il se contentera de la 2e place.
Trois fois en tête du tournoi en… 2011
Avec une moyenne de score de 71,60, il n’a été que trois fois en tête d’un Masters. C’était en 2011, lors des trois premiers tours. Avant de craquer le dimanche et de prendre finalement la 15e place après un horrible 80 (+8). D’aucuns prétendent que c’est depuis ce chemin de croix entamé sur le par 4 du 10 que le syndrome Masters est né en lui.
Le Britannique, si brillant sur le Tour européen (six fois vainqueur de la Race par exemple) mais également sur le PGA Tour (vainqueur de la FedEx Cup à trois reprises), fait pourtant preuve d’une incroyable résilience en Majeurs. Il n’en a plus gagné un seul depuis août 2014. En conférence de presse ce mardi à Augusta, il a d’ailleurs évoqué cet état de fait. En toute franchise, comme d’habitude.
« Au cours de ma carrière, j’ai fait preuve de beaucoup de résilience face aux revers, et j’ai l’impression d’avoir connu la même chose depuis le mois de juin (Ndlr, il fait ici allusion à sa défaite face à Bryson DeChambeau à l’US Open du côté de Pinehurst). Le golf que j’ai joué depuis, j’en suis plutôt fier. On connaît des échecs et des déceptions, mais tant qu’on sait en tirer des leçons, aller de l’avant et essayer de mettre ces apprentissages en pratique, je trouve cela très important. J’ai l’impression de l’avoir démontré à maintes reprises au cours de ma carrière. Quand vous avez une longue carrière comme la mienne, vous apprenez à encaisser les coups, les bons et les mauvais moments, sachant que si vous faites du bon travail en y mettant la manière, ces déceptions se transformeront à nouveau en bons moments très bientôt. »
Comme c’est un parcours que nous fréquentons chaque année, je pense qu’il est peut-être nécessaire d’avoir un peu plus de connaissances pour certains coups
Rory McIlroy
Venu plusieurs jours avant ce 89e Masters tâter le terrain comme on dit, le tester sans la présence des fans et des autres joueurs, lui ont été apparemment bénéfiques. Il a aussi décidé de changer ses habitudes en ne jouant pas le dernier tournoi placé en amont du Masters, à savoir le Valero Texas Open, et en choisissant de s’aligner à Houston, quinze jours avant l’échéance.
« C’était la première fois que je jouais à Houston, sur ce parcours, souligne l’actuel n°2 mondial. Je savais qu’il me fallait au moins une semaine de compétition supplémentaire avant d’arriver ici. J’ai opté pour Houston plutôt que San Antonio, juste pour changer un peu de décor. Mais ça s’arrête là. J’essaie de me préparer pour le Masters de la même manière que la plupart des autres semaines. Comme c’est un parcours que nous fréquentons chaque année, je pense qu’il est peut-être nécessaire d’avoir un peu plus de connaissances pour certains coups, et il est certain que vous allez affronter des coups particuliers sur ce parcours, que vous n’avez pas l’habitude d’affronter les autres semaines de l’année. Donc, venir ici plusieurs fois, faire un peu plus de préparation sur certains de ces coups sur le parcours de golf, je pense que c’est important. Mais une fois la semaine du tournoi entamée, comme c’est le cas actuellement, on essaie de la gérer de la même manière et de respecter les consignes. Je veux faire certaines choses, notamment mes exercices sur le green, et m’assurer de faire mes séances de practice pour être sûr d’avoir toutes les conditions et me sentir le plus à l’aise possible pour jouer jeudi matin. »
Sur les coups de départ, certains sont peut-être un peu moins intimidants visuellement, comme sur le 10, avec moins d’arbres que d’habitude sur le côté gauche
Rory McIlroy
L’ouragan Helene en septembre dernier a quelque peu redistribué les cartes quant à la stratégie à adopter face à ce par 72 long de 6 908 mètres. Une centaine d’arbres ont été déracinés. Une donnée qui, incontestablement, entre en jeu. Mais pas tant que ça si on écoute Rory McIlroy.
« Je l’ai joué le lundi juste avant Houston, et aussi lundi dernier, énumère-t-il. Le parcours était assez rapide et assez ferme, probablement un peu plus proche de ce qu’il sera, je l’espère, ce week-end. Lundi dernier, le parcours était un peu mou et lent, probablement comme il l’est maintenant après la pluie d’hier. Je pense que le plus important, c’est que le parcours ne soit pas différent. Il y a quatre nouveaux greens aux 1, 8, 15 et 16 (tous endommagés par l’ouragan), qui sont toujours un peu plus fermes, surtout au 15, par exemple, où on peut voir les balles traverser le green. Sur les coups de départ, certains sont peut-être un peu moins intimidants visuellement, comme sur le 10, avec moins d’arbres que d’habitude sur le côté gauche (Ndlr, là où il avait perdu le Masters en 2011 en s’égarant près des chalets jouxtant le fairway). Votre cible désormais, c’est cette tour de télévision en bas de la colline que l’on ne voyait pas avant. Visuellement, on a l’impression qu’on n’a plus besoin de tourner la balle autant qu’avant. Il y aussi un peu plus de à droite au 3. Si vous décidez de frapper le driver, il y a quelques arbres en surplomb qui ont disparu. Mais bon, à part ça, je pense que c’est à peu près pareil. »
Ces soirées de printemps où je m’asseyais avec mon père pour regarder ce tournoi
Rory McIlroy
Il l’avoue lui-même, Augusta est un endroit singulier. A plus d’un titre. Et il est clair qu’au fond de lui-même, s’imposer enfin dans ce lieu si particulier serait une sorte d’aboutissement à la fois personnel et sportif.
« Sur ce parcours, vous allez affronter des coups et des putts que vous n’avez pas forcément l’occasion d’affronter toutes les autres semaines de l’année, confirme-t-il. C’est donc là, à mon avis, qu’il faut le plus réfléchir et consacrer le plus de temps, simplement pour s’assurer d’être à l’aise sur cet aspect du jeu. J’ai toujours adoré ce parcours. On me demande souvent : « Si je ne pouvais jouer que sur un seul parcours toute ma vie, lequel choisirais-je ? » Et je trouve que me promener ici tous les jours serait vraiment génial. »
« Il y a l’histoire, ces soirées de printemps où je m’asseyais avec mon père pour regarder ce tournoi, poursuit-il, des étoiles dans les yeux. Je pense que tout cela me revient aussi. Je me souviens pourquoi je suis tombé amoureux de ce sport. Je trouve que c’est un endroit tout simplement magnifique. Je ne pense pas qu’il existe de plus beau parcours de golf au monde. C’est comme jouer au golf dans le plus beau parc du monde. Regardez l’histoire et tout ce que ce club et ce parcours représentent pour le golf… Je pense que tout cela y contribue. »
Du bruit, de la littérature !
Alors ? 2025 sera-t-elle l’année de Rory McIlroy, déjà victorieux en 2025 d’un Signature Event (AT&T Pebble Beach Pro-Am) et du Players Championship, présenté comme le très officieux 5e Majeur ? Le principal intéressé a envie d’y croire même si sa simplicité toute légendaire l’en empêche.
« Ce n’est que de la littérature tout ça, lâche-t-il en guise de conclusion. C’est du bruit. J’essaie juste d’ignorer tout ça autant que possible. Je dois aborder ce tournoi comme tous les autres auquel je participe tout au long de l’année. Je comprends tout cet engouement autour de moi. Chaque année, il y a beaucoup d’anticipation à l’approche de ce tournoi mais je dois juste garder la tête baissée et me concentrer sur mon travail. »
Photo : Masters Tournament
