
Dans une vidéo publiée par le DP World Tour, Mike Lorenzo Vera détaille les problèmes qu’il a pu rencontrer en compétition avec son mental. Son témoignage sans détour est à la fois touchant et passionnant, tant il montre comment le golfeur professionnel peut être victime d’images mentales négatives qui peuvent ruiner en partie une carrière.
Dans une très longue interview qu’il a accordée au DP World Tour, le jeune retraité des fairways Mike Lorenzo Vera se livre beaucoup. Sans fard. Réputé pour son franc-parler, le Basque revient dans le détail sur ses 17 années sur le circuit européen, ses 285 départs et les moments forts qui ont défini sa belle carrière.
En anglais, il se confie sur les difficultés qu’il a rencontrées sur le terrain, offrant un aperçu rare des luttes invisibles de la vie au plus haut niveau du golf. Mike parle aussi avec franchise de sa santé mentale. Cette conversation offre un regard brut et honnête sur la carrière de l’une des personnalités les plus populaires du circuit.
Le moment le plus poignant, instructif et amusant en même temps, est quand il parle de ses problèmes de mise en jeu, à partir de 25’20 dans cette vidéo de 54 minutes.
« Quels sont les coups qui ne vont pas vous manquer que vous ne ferez plus en étant retraité ?» , demande l’intervieweur George Harper Jr.
« Les tee shots, répond MLV. Je me suis battu avec ça pendant près de 20 ans. Sous pression, je faisait des ‘high pulls’ (balle très haute envoyée directement à gauche de la cible sans effet). La balle partait très, très à gauche, directement. Souvent, c’était synonyme de balle perdue. Je n’ai jamais vraiment compris comment driver. Pourtant je tapais le drive droit quand j’étais jeune. Mais vers 2010, j’ai perdu ça. Complètement.»
Je voyais la balle partir à gauche avant de l’avoir frappée
Et Mike d’entrer dans le détail de ses démons mentaux sur les tees de départ. « A Wentworth par exemple. A partir de 2010, je ne voyais que le hors limite à gauche quand je me présentais sur le tee du 1. Et pourtant, ma trajectoire naturelle est le fade (effet de gauche à droite), ce qui devrait me mettre à l’abri. J’arrivais toujours à l’envoyer quoi qu’il arrive dans les maisons à gauche. Je ne voyais que ça au départ. Je ne sais pas pourquoi. J’avais construit quelque chose dans ma tête. Quelque chose de négatif. Une visualisation fantôme. Une invention de l’esprit. Je me plaçais au-dessus de la balle et je la voyais déjà partir haute à gauche avant de l’avoir frappée.»
L’intervieweur poursuit. «Vous n’êtes sans doute pas le seul à avoir connu ça. En êtes-vous sorti un jour ? Avez-vous tenté des choses pour ça ?»
Le joueur français répond du tac-au-tac. «J’ai tapé des balles et des balles… En essayant de me faire confiance.» Et il se lance dans une nouvelle anecdote. « Depuis 2008 jusqu’à la fin de ma carrière, à Crans-Sur-Sierre, au départ du trou n°15, il y a des arbres à gauche. Mais tout près du départ». Effrayée par la suite de l’histoire, George Harper Jr lui demande de poursuivre.
Vous vous dites oui, je ne suis pas assez bon mentalement pour ce sport
« J’y pensais chaque année. Ces arbres… Alors qu’ils n’étaient même pas en jeu, en réalité. Il y a des années, j’ai tapé des fers 2 au départ alors que c’est un par 5. Cette année, pour mon dernier tournoi, je l’ai mise directement dans ces arbres. Ils sont à 50 yards (45 mètres) du départ… C’est ridicule. Un coup d’handicap 25. Et je me suis dit ‘enfin je l’ai fait’. Enfin je l’ai envoyée dans ces arbres. J’avais raison. Ces arbres étaient vraiment en jeu»
La conclusion de MLV est le cauchemar de tous les golfeurs qui ont connu les fameux yips, quels qu’ils soient, ou simplement des blocages sur le plan mental. « Quand vous avez “réussi” à vous mettre quelque chose en tête, cela peut vous détruire pour de bon. Et vous vous dites : “Oui, définitivement, je ne suis pas assez bon mentalement pour ce sport. ».»
Photo Stuart Franklin/Getty Images