
Blessé à la main en début d’année à la suite d’un bête accident domestique, Scottie Scheffler a peiné à retrouver le rythme infernal de son année 2024 marquée par sept succès (dont le Masters) et, cerise sur le gâteau, un titre olympique. Mais après quelques semaines de tâtonnement, le patron est de retour aux affaires.
L’épisode des raviolis est terminé. On osera ce mauvais jeu de mots, mais Scottie Scheffler a remis la sauce à Quail Hollow. Dominateur dans ce PGA Championship comme il l’avait été deux semaines plus tôt à la CJ Cup Byron Nelson, lors de sa première victoire de l’année, le n°1 mondial s’est imposé à Charlotte en mode patron. Même si ses neuf trous de l’aller furent moins flamboyants le dimanche.
Sur le retour, pour repousser les assauts de Jon Rahm, Scheffler a revêtu sa toque de chef étoilé. Comme il l’avait fait tant et tant de fois en 2024.
Sur un parcours sélectif, où la qualité du grand jeu était essentielle, le triomphe du meilleur joueur du monde n’est pas une surprise. Sauf que cette année, le boss du circuit mondial a eu un peu de retard à l’allumage. La cause ? Un bête accident domestique intervenu pendant les fêtes de fin d’année dernière et qui a complètement chamboulé son début de saison.
Pas chic, les raviolis
En faisant la cuisine chez lui pendant la période de Noël, plus précisément en préparant des raviolis, Scottie Scheffler s’est coupé avec un verre à vin brisé, au niveau de la paume de sa main droite, juste sous le majeur. Résultat, il a dû subir une intervention chirurgicale et a manqué les deux premiers tournois de la saison.
Plus inquiétant encore, il a tardé ensuite a retrouvé sa superbe. Cette blessure à la main, pour le moins gênante pour un golfeur, lui a fait perdre son toucher autour des greens selon certains. Il ratait plus à gauche au driving pour d’autres. Lors de ses premières apparitions sur le PGA Tour, en février, ses statistiques étaient effectivement en baisse sur les points forts de son jeu (si tant est qu’il comporte des points faibles). Wedging moins chirurgical, chipping moins décisif et capacité à toucher des fairways depuis le départ réduite.
Un maître zen aux excès de colère
Et puis on a vu en mars, en avril aussi, un Scottie Scheffler parfois colérique sur le parcours. Impatient. Où était passé le flegme légendaire du Texan ?
Celui qui, un an auparavant, dans un PGA Championship remporté par Xander Schauffele, avait conservé sa “cool attitude” malgré une arrestation lunaire le matin du deuxième tour par un agent de la circulation carrément zélé.
Menotté, conduit au poste, il avait ensuite repris le cours de son tournoi comme si rien ne s’était passé, ou presque. Sur cet épisode rocambolesque, les vidéos du matricule 00654436, finalement innocenté, ont circulé tout azimut.
Scottie Scheffler, c’était vraiment Maître zen. Sauf en 2025.
La haute précision, le toucher, même l’insolente réussite, tout est revenu
A son retour à la compétition en février 2025 ses premiers résultats ne sont pas catastrophiques, loin s’en faut. Avant qu’il ne renoue avec la victoire au Texas au début de mois de mai, son pire classement est une 25e place au Phoenix Open.
Mais pendant ce premier trimestre, il a dû dire adieu à son titre dans l’Arnold Palmer Invitational, dans le Players Championship, au Masters et au RBC Heritage. Ça fait sans doute beaucoup pour un seul homme connu pour être un féroce compétiteur.
Simple et humble, le jeune papa de 28 ans est aussi un champion terriblement orgueilleux.
Alors aux côtés de son coach de son enfance, Randy Smith, il a travaillé dur. Et à force de persévérance, le stakhanoviste Scheffler finit par retrouver à la fois ses sensations, son calme, son toucher et surtout le chemin des fairways.
Il a aussi, comme par magie, bénéficié d’un soupçon de réussite qui l’avait accompagné lors de ses succès de 2024, à l’image de ces trois drives : deux au 3e tour et un au dernier tour.
Samedi, le premier au 8 est revenu plein fairway après avoir heurté un arbre, l’autre au 14 a fini donné pour l’eagle alors que de son propre aveu, «à cette distance, à 1 mètre près, vous n’avez aucun contrôle sur le vol de la balle et sur son résultat final, même si vous la tapez comme vous voulez comme ce fut mon cas, il faut de la chance.»
Quant à celui du 2 lâché à gauche le dimanche, alors qu’il sortait d’un bogey sur le 1 qui aurait pu le mettre (un peu) dans le doute, il a tapé un chemin bitumé et a terminé à 70 mètres du drapeau, avec un angle et un lie parfait. Pour un birdie à l’arrivée…
Les ingrédients de la victoire sont donc à nouveau dans la besace de Scheffler : une bonne dose de haute précision et cette petite pincée de chance quand il le faut. Résultat ? Deux victoires de suite.
En attendant Rory…
L’analyste Brandel Chamblee de la chaîne NBC ne s’y était pas trompé, lui qui avait annoncé en début de tournoi qu’après les épisodes loufoques de l’arrestation et des raviolis, “personne cette fois ne pourrait arrêter Scottie Scheffler cette semaine, sauf s’il croise la route d’un buffle d’eau (sic) en se rendant sur le parcours.”
Il n’y a pas eu de buffle à l’horizon pour le freiner. Ni de menottes, ni de bout de verre. Ni même un Rory McIlroy rasséréné par sa victoire à Augusta. Son grand rival était aux abonnés absent cette semaine. Jon Rahm l’a bien chahuté quelques instants, mais la fin le vainqueur de la FedEx 2024 était bien le meilleur à Quail Hollow.
Comme il l’a été tant de fois l’an passé. Le boss en a d’ailleurs profité pour reprendre la tête du classement général du PGA Tour.
La recette du “Schef” est simple. Des drives rectilignes, des coups de fer d’une effrayante précision, un toucher de couturière autour des greens et un putting… tout simplement correct.
Avec cette maîtrise-là, il n’a sûrement pas fini de gagner en 2025 d’autant que chez lui l’appétit vient en mangeant. Il commencera ce lundi sa 138e semaine au sommet de la hiérarchie mondiale. Seuls deux joueurs ont occupés cette position plus longtemps que lui : Greg Norman (331 semaines) et Tiger Woods (683 semaines).
On a hâte de voir ce Scottie Scheffler là à la bagarre avec le Rory McIlroy du Masters. On en rêve même. Rendez-vous à Oakmont en juin pour l’US Open…
Photo by Maddie Meyer/PGA of America