
Malgré un rhume tenace, Grace Kim, 24 ans, est revenue en conférence de presse sur cette victoire qui bouleverse sa carrière professionnelle. L’Australienne a aussi avoué être passée par des moments très difficiles en début d’année. Mais la rage de vaincre, notamment lors de ces deux tours de play-off face à Jeeno Thitikul, en a décidé autrement.
Propos recueillis par Lionel VELLA, à Evian
Quel final de fou ! Racontez-nous ce chip incroyable lors du premier trou de play-off qui vous permet de rester dans la course pour la victoire finale…
GRACE KIM : J’étais évidemment assez déçue de découvrir que ma balle était au milieu de l’eau. Mais en golf, on le sait, rien n’est jamais fini. Je n’étais pas inquiète. J’ai dropé la balle sur un lie plutôt correct. Et cela a suffi pour que mon chip suivant grâce à mon 58 finisse sa course dans le trou. Je ne sais pas si je pourrais refaire ce coup ! C’était super. Les trois fois où j’ai joué ce trou 18 aujourd’hui, j’ai utilisé le même club. Un hybride 4. Il restera dans mon sac.
Qu’est-ce qui vous passe dans la tête quand vous voyez votre putt pour eagle et pour la victoire sur le 2e trou de play-off finir dans le trou ? Réalisez-vous à cet instant précis que vous devenez vainqueur en Majeur ?
G.K. : Pour être honnête, j’y ai pensé avant de faire le putt. Je n’aurais probablement pas dû, mais ce n’est pas grave. Ça m’a rendue encore plus nerveuse. Je me souviens qu’Ayaka (Furue, en 2024) avait fait un putt similaire. Je crois que j’ai eu beaucoup de doubles breaks cette semaine, et celui-là en faisait partie, c’est sûr. J’ai juste regardé droit vers le trou. C’est ce que mon caddie m’a dit de faire et je l’ai fait. Après ? Je ne sais pas ce qui s’est passé. Tout est allé si vite. Mais je suis très contente d’être assise ici, devant vous en conférence de presse (rires).
J’ai eu beaucoup de doutes en début d’année. Je commençais à perdre ma motivation. J’ai dû avoir des discussions difficiles avec mon staff technique.
Grace Kim
Comment pourriez-vous résumer votre semaine ici à Evian ?
G.K. : C’est évidemment un immense aboutissement pour moi. J’ai eu beaucoup de doutes en début d’année. Je commençais à perdre ma motivation. J’ai dû avoir des discussions difficiles avec mon staff technique. Il fallait que je me réveille un peu. Être assise ici à côté de ce trophée est vraiment surréaliste. J’ai aussi attrapé un petit rhume en début de semaine, donc je savais que je n’étais pas à 100 %. Mais, encore une fois, même si je ne suis qu’à 80 %, je donnerai mon 100 %. Rien ne pouvait m’arrêter cette semaine !
Vous entrez dans la grande liste des vainqueurs australiens en Majeur, quelques semaines seulement après Minjee Lee. Qu’est-ce que cela signifie pour vous ?
G.K. : C’est incroyable ! Je ne savais pas vraiment que j’allais être assise ici, et surtout si tôt. J’ai vu une photo de Karrie (Webb) entrant dans les vestiaires, descendant le 18, donc voir ça chaque jour est motivant. Évidemment, le premier titre Majeur de Minjee était ici (Ndlr, en 2021), et c’est maintenant le mien aussi. Je vais m’y faire (Elle sourit) Je ne sais pas quand je vais m’en rendre compte avec certitude, mais oui, c’est incroyable ce que je suis en train de vivre, là, maintenant.
Jeeno, c’est une amie vraiment sympa à avoir à ses côtés et, je pense, une excellente joueuse à avoir sur le circuit.
Grace Kim
Quelles sont ces difficultés que vous venez d’évoquer ?
G.K. : J’ai vraiment eu du mal après ma victoire à Hawaï (Ndlr, en 2013 au LOTTE Championship). J’ai gagné très tôt et c’était un excellent résultat. Mais j’ai eu aussi l’impression de ne pas avoir vraiment franchi la ligne. J’ai été en lice à plusieurs reprises, et je n’y suis pas parvenue.
Je crois que j’ai fini par comprendre que ce n’est pas vraiment mon jeu techniquement qui est en cause. C’est plutôt une question de compétences que je dois acquérir en jouant sur le Tour semaine après semaine. L’aspect mental du jeu est devenu un sujet crucial. J’ai été envahie par beaucoup de doutes, et ça a très rapidement pris une ampleur considérable e, début d’année. On peut parler de burn out. Mais surmonter ça n’aurait pas été possible sans mon staff. Je sais que beaucoup de filles savent combien il est important d’être entourée d’une bonne équipe. C’est vraiment crucial d’avoir des gens qui vous soutiennent, et même dans les moments où vous n’avez pas confiance en vous. Je leur en suis très reconnaissant. Honnêtement, je n’y serais pas parvenu sans eux.
Vous étiez dans la même partie que Jeeno (Thitikul). Elle a été en tête la journée. Qu’avez-vous ressenti en la battant alors que vous êtes toutes les deux plutôt proches ?
G.K. : C’est bien sûr une excellente joueuse. Elle a tellement bien joué cette année. Je ne pense pas qu’elle ait terminé en dehors du top 10, même cette saison. J’admire sa positivité. Elle a un beau sourire. J’ai fait le par au 2e trou et elle m’a dit : « Sourit, tu as fait le par. » Du coup, elle me garde les pieds sur terre (Ndlr, Grace Kim a concédé deux bogeys aux trous 1 et 4). Jeeno, c’est une amie vraiment sympa à avoir à ses côtés et, je pense, une excellente joueuse à avoir sur le circuit.
J’ai dit cette semaine que je me sentais de plus en plus à l’aise à Evian. Évidemment, j’ai un peu pleuré la première année.
Grace Kim
Dans quelle mesure votre jeu a-t-il changé depuis vos débuts sur le LPGA Tour ?
G.K. : Je pense que techniquement, ça n’a pas beaucoup changé. J’ai certainement amélioré quelques points, gagné de la distance au fil des ans, mais globalement, on s’est rendu compte que c’est, encore une fois, davantage une question de compétences sur le parcours. On n’aura jamais des lies plats et parfaits au practice, avec certaines directions de vent, etc.
J’ai dit cette semaine que je me sentais de plus en plus à l’aise à Evian. Évidemment, j’ai un peu pleuré la première année (Ndlr, cut manqué en 2023, 51e en 2024). On ne peut pas improviser la première année, c’est sûr. Pouvoir vivre cette expérience, même si ce n’est que depuis deux ans, c’est définitivement une grande accélération en termes d’apprentissage.
Cette victoire est d’autant plus méritante car vous êtes malade, non ?
G.K. : Oui, c’est vrai. J’ai pas mal toussé hier. J’allais bien les deux premiers jours. Je me sentais vraiment mal de tousser sans arrêt sur les putts des autres joueurs. J’étais un peu en difficulté. J’ai traversé ça lors des trois derniers jours. C’était probablement pire hier. Mais bon, j’ai réussi à surmonter la douleur.
Photo : Philippe Millereau / KMSP