
Dans cette série d’articles, nous revenons sur les six dernières éditions de la Ryder Cup à travers un « top 5 » des grands moments de ces affrontements Europe – États-Unis. Ce quatrième épisode revient sur la plus française de toutes les éditions, celle de 2018 qui s’est disputée au Golf National. L’Europe de Thomas Bjørn n’était pas favorite, mais elle a réussi haut la main son… Paris.
Ce quatrième épisode de nos « flash backs » sur la Ryder Cup détaille les cinq moments à retenir de cette victoire européenne éclatante au Golf National à Guyancourt. Cette édition 2018 a été marquée par la réussite de l’organisation, par un duo magique, par un record individuel, mais aussi par le contraste saisissant entre l’unité européenne et les tensions internes dans l’équipe US.
L’Europe renversante et écrasante
Sur le papier, l’Europe n’est pas favorite au début de cette édition 2018. Les États-Unis ont une pluie de stars dans leurs rangs : Tiger Woods, Phil Mickelson, Dustin Johnson, Brooks Koepka, Bryson DeChambeau, Patrick Reed… Les joueurs de Thomas Bjørn paraissent plus tendres : il y a là cinq « rookies » (débutants), nommés Tommy Fleetwood, Tyrrell Hatton, Alex Noren, Thorbjørn Olesen et Jon Rahm.
Après une première session de quatre balles favorable aux USA (3-1), la Ryder Cup bascule pourtant complètement du côté du Vieux continent. Le vendredi après-midi, les Bleus avalent la session des foursomes avec quatre victoires express (5-3). L’écart ne fera que s’accentuer. Les duos Francesco Molinari – Tommy Fleetwood et Justin Rose – Henrik Stenson flambent, les stars américaines déçoivent.
Comme un symbole, la victoire européenne est acquise quand le jour des simples, Phil Mickelson expédie une balle dans l’eau sur le par 3 du 16, un coup synonyme de défaite face à Francesco Molinari et de capitulation pour les USA. Le score final (17,5 à 10,5 points) est écrasant. Le dernier putt longue distance (12 mètres) gagnant du Suédois Alex Noren sur le green du 18 déclenche des scènes de liesse inoubliables.
Le flamboyant duo « Moliwood »
Quand Thomas Bjørn décide d’associer Tommy Fleetwood à Francesco Molinari, personne ne s’attend à ce que ce duo marque l’histoire de la Ryder Cup. Et pourtant, l’Anglais et l’Italien vont produire une performance exceptionnelle. Quatre victoires en quatre matches !
Ils sauvent d’abord l’honneur européenne lors de la première session de quatre balles, en battant Tiger Woods et Patrick Reed (3&1). Puis ils survolent leur foursomes face aux amis Jordan Spieth/Justin Thomas (5&4).
Le samedi, cette paire, vite surnommée « Moliwood » et totalement adoptée par les fans européens, domine de nouveau Woods et Reed en quatre balles (4&3). Puis elle écrase Woods et DeChambeau en foursomes (5&4). Leur jeu de fers et leur précision dans le grand jeu font merveille sur un parcours aux fairways resserrés et au rough pénalisant.
Francesco Molinari parachève sa performance par une victoire en simple le dimanche contre Phil Mickelson. Il est le premier joueur européen à inscrire le 5 sur 5 parfait dans une Ryder Cup. Tommy Fleetwood, lui, manque le sans-faute en s’inclinant face à Tony Finau.
Mais un duo est né. Les deux amis s’amuseront d’ailleurs pendant plusieurs semaines de cet exploit accompli à deux.
Des tensions dans l’équipe US, Woods et Mickelson décevants
On ne sait presque pas par où commencer pour décrire l’ambiance qui a régné dans l’équipe américaine lors de cette Ryder Cup..
Dans le vol qui les conduit vers la France, Brooks Koepka et Dustin Johnson s’embrouillent pour une affaire privée. Habitué lors des éditions précédentes à jouer avec Jordan Spieth, Patrick Reed vit mal d’être privé de son partenaire préféré au profit de Justin Thomas.
Choisi par son capitaine Jim Furyk en tant que wild-card, Phil Mickelson affiche un certain dégoût pour le « set up » du Golf National choisi par les Européens. Il dira même plus tard que pour lui, « jouer un parcours préparé aussi durement est une perte de temps… » Résultat, deux défaites en deux matches.
Lui aussi « captain pick », Tiger Woods vient de gagner le Tour Championship et de réussir un nouveau « come back » qui a époustouflé le monde du golf, mais il arrive très fatigué à Paris. Il est associé deux fois en double à Reed. Le duo ne prend pas. Le meilleur joueur de l’histoire du golf enregistre un zéro pointé en quatre matches. « J’aurais aimé faire mieux pour mon équipe », dira-t-il, laconiquement.
Les choix de Jim Furyk en double interrogent également : associer les bombardiers (et individualistes) DeChambeau et Mickelson en foursomes sur un parcours aussi étroit ? Quelle drôle d’idée… Résultat, une fessée mémorable contre Garcia et Noren, 5&4. Après neuf trous, les Américains étaient 7 down…
Sergio Garcia dans l’histoire
En battant Rickie Fowler (2&1) en simple, Sergio Garcia dépasse Nick Faldo avec 25,5 points conquis en Ryder Cup et devient le recordman en la matière, toute équipe confondue. L’Espagnol ne peut retenir quelques larmes. Il pense bien sûr à cet instant à Severiano Ballesteros, l’inspirateur de tant des joueurs ibères devenus amoureux de cette épreuve. « C’est un moment que je n’oublierais jamais », s’émeut le vainqueur du Masters 2017.
Avec trois points de plus deux ans plus tard à Whistling Straits, Garcia a porté son total à 28,5 points. Il sera dur à aller chercher…
Une ambiance exceptionnelle, une organisation « so french » saluée par tous
Pour la première fois de l’histoire, la Ryder Cup s’est jouée en France. L’événement a été salué par tous pour sa capacité à combiner efficacité logistique et ambiance festive. Le parcours de l’Albatros du Golf National, exigeant mais aussi très bien adapté au format de match-play, a aussi fait l’unanimité.
L’actuel président de la FFGolf, Pascal Grizot, a joué un rôle déterminant dans l’organisation de cette Ryder Cup, occupant la fonction de président du Comité d’organisation France 2018. Cette édition a laissé un héritage durable pour le golf en France.
L’ambiance sur le parcours a été un grand succès. Des chants, des célébrations, de la fête, sans débordement, tout s’est déroulé comme dans un rêve. L’une des grandes réussites de l’événement fut l’installation de la tribune géante au départ du trou n°1. Que du bonheur, même au tout petit matin pour les sessions de quatre balles !
Photo : FRANCK FIFE / AFP