L’eau et son utilisation publique ou privée font aujourd’hui l’objet d’une prise de conscience : politiques et médias ont largement abordé ce sujet ces derniers jours. Le gouvernement a ainsi présenté un plan le 30 mars dernier. C’est dans cet esprit que Pascal Grizot, président de la Ffgolf a signé ce vendredi 14 avril, au golf de Seignosse, un contrat de progrès avec l’Agence de l’eau Adour-Garonne.
Rappelons que Golf Planète avait publié en mars une enquête en trois volets sur l’utilisation de l’eau dans les golfs en France et à l’étranger qui pointait le retard de notre pays en la matière.
Il faut espérer avec Laurent Boissonnas, président de Resonance, présent à Seignosse, que « cette journée sera un moment stratégique dans notre politique de transition écologique ».
Sur la photo de couverture, Pascal Grizot est entouré de sa vice-présidente Sylvianne Villaudière, des deux présidentes de ligues Nouvelle Aquitaine et Occitanie et d’élus landais.
Il faut accélérer les actions
Pascal Grizot a d’ailleurs insisté en invitant chacun à accélérer les actions engagées depuis 15 ans : « De nombreuses actions méconnues ont été menées déjà depuis plusieurs années : la fédération et les golfs français mènent une gestion raisonnée de l’eau… Leurs nombreuses actions sont souvent méconnues… Mais il convient d’aller de l’avant : ce contrat de progrès n’est pas le début d’une prise de conscience de la filière golf mais une étape importante… Notre rapprochement avec les agences de l’eau et aujourd’hui avec l’agence de l’eau Adour-Garonne participe de cette ambition d’accélération et de contribution à l’effort collectif… ».
120 golfs éligibles aux aides de l’agence de l’eau Adour-Garonne
Le contrat de progrès qui lie désormais la ffgolf à l’agence de l’eau Adour-Garonne prône les bonnes pratiques en matière de gestion de l’eau, de préservation de la biodiversité et de gestion des intrants sur les parcours de golf. Il permet aussi de lister de manière précise les différentes actions susceptibles d’être éligibles au soutien financier de l’Agence de l’eau et de fixer les conditions à ce dernier pour les 120 golfs implantés sur le bassin Adour-Garonne. L’engagement des golfs dans le programme et Label Golf pour la biodiversité, initié par la ffgolf, en est notamment une. A ce jour, 31 golfs du bassin Adour-Garonne sont déjà engagé dans ce programme.
Pour Guillaume Choisy, directeur général de l’agence de l’eau Adour-Garonne, une des 6 agences en France, « ce contrat illustre l’engagement de cette profession dans la préservation de la quantité et de la qualité de l’eau sur les territoires dans un contexte de changement climatique ».
Depuis 2015 et les premières collaborations de la ffgolf avec les agences de l’eau, des économies d’eau importantes ont été réalisées (une économie de prélèvement de 926 010 m3/an générée par 91 golfs ayant investis pour un total de 32 M€) laissant présager des résultats tout aussi positif dans le cadre de ce nouveau contrat de progrès, le troisième signé par la ffgolf avec les Agences de l’eau. Sur le bassin Adour-Garonne, 10 golfs ont déjà bénéficié par le passé d’un soutien financier.
Un plan d’actions plus vaste
Pascal Grizot a également rappelé que la ffgolf se mobilise sur d’autres dossiers susceptibles d’influer de manière positive sur les besoins en eau de ses golfs. Elle encourage notamment le développement des projets alternatifs aux prélèvements dans le milieu naturel, dont celui de la réutilisation des eaux usées traitées par les stations d’épuration qui apparait particulièrement pertinent.
Elle encourage également le déploiement de nouvelles pratiques culturales, levier important pour réduire les consommations d’eau. Les opérations de conversions de flore et de regarnissage régulier permettent d’installer et de maintenir de nouvelles espèces de graminées développées par les semenciers qui offrent à la fois plus de résistance au manque d’eau, aux maladies, aux opérations de tonte et au piétinement.
Des matériels d’aération profonde de plus en plus performants permettent d’agir sur le profil du sol et d’optimiser sa capacité à stocker l’eau. Ces opérations favorisent un enracinement profond du gazon pour à la fois mieux résister au manque d’eau, espacer les arrosages et réduire les apports d’engrais…
En cas de sécheresse, seuls les greens sont arrosés, soit moins de 2% de la surface totale
La consommation nationale moyenne annuelle d’eau d’un golf est de 25 000 m3 par an et par tranche de 9 trous. En cas de sécheresse dure et prolongée, seuls les greens (essentiels à la survie du parcours) sont arrosés. Ils ne représentant qu’1 à 2% de la surface totale du golf. Ainsi, 98 à 99% de la surface totale du golf ne sont en revanche plus arrosés, ce qui démontre le niveau de responsabilité de tous les acteurs de la filière golf. Il est estimé que 100 à 120 m3 d’eau par jour sont nécessaire et obligatoire pour la survie des greens d’un golf de 18 trous par forte chaleur. Cela représente 1 à 1,5 hectare soit 2% de la surface du golf et par comparaison c’est l’équivalent de 1,5 terrains de football. Par conséquent, pour un golf 9 trous, le besoin minimal pour la survie des greens est de 50 à 60 m3 / jour. L’arrosage prend en compte l’évapotranspiration due à la température, à l’ensoleillement et au vent qui détermine le calibrage du bon volume vital nécessaire.
Seignosse va réduire sa consommation d’eau de 30%
Le choix de Seignosse par Pascal Grizot pour sa conférence de presse sur l’utilisation de l’eau dans les golfs n’est pas un hasard. D’abord parce que le sud-ouest de la France a été touché par la sécheresse et le feu l’été dernier, ensuite parce que le Bassin Adour/Garonne a beaucoup réfléchi et agi en la matière, mais aussi parce que le golf de Moliets a mis en place une politique de gestion de l’eau qui peut servir d’exemple.
Golf Planète a rencontré le directeur de Seignosse, Christophe Rondelé, pour en saisir les tenants et aboutissants.
Golf Planète : Quelle leçon peut-on tirer en matière de transition écologique à partir de vos récents travaux menés à Seignosse ?
Christophe Rondelé : Nous avons concentré nos efforts d’investissement 2022/2023 à la réfection complète de notre système d’irrigation : l’idée étant d’arroser mieux pour arroser moins. Notre système avait plus de 30 ans et il était devenu totalement obsolète : arroseur longue portée, problèmes électriques, ensemble du réseau obstrué par des dépôts de fer (une des caractéristiques de la qualité de l’eau dans les Landes).
Aujourd’hui, notre chantier d’arrosage est terminé après avoir été mené tambour-battant entre le 1er octobre 2022 et le 31 janvier 2023. Ce nouvel arrosage va nous apporter beaucoup plus de précision et une meilleure maitrise des apports d’eau.
L’objectif étant de réduire nos prélèvements de 30% ! Voici un effet concret dans notre objectif de changer en profondeur nos pratiques. Il est à souligner que le golf de Seignosse est sur le point d’obtenir la labellisation niveau bronze de la biodiversité. Des actions concrètes sont d’ores et déjà mise en place et communiquées régulièrement au grand public au moyen de panneaux d’information disposés sur le parcours.
Ces actions sont publiées sur les réseaux sociaux sous l’appellation « le vendredi, c’est écologie » : elles suscitent de nombreuses réactions favorables. Nous avons ainsi des retours très positifs sur les « hôtels à insectes », les nichoirs à oiseaux, les refuges pour chauve-souris, mais également pour les nichoirs à martin pêcheur installés en bordure de nos lacs.
Ce n’est qu’une première étape puisque nous postulons pour le label argent en 2024.
Ces actions sont importantes et s’inscrivent parfaitement dans le plan « Impact 2024 » qui est au cœur de la politique du groupe Resonance Golf Collection qui gère le Golf de Seignosse.
« Chaque golfeur doit comprendre et défendre la transition écologique »
GP : Vous aimez dire que la transition écologique ce sont des éléments de langage, que voulez-vous dire ?
C.R : Nous devons donner des éléments de langage à nos golfeurs. En effet, nombreux sont ceux qui sont totalement étrangers à l’entretien des terrains de jeu, à l’arrosage, aux opérations mécaniques etc .
Par exemple, trop peu de golfeurs sont à même de véhiculer des informations concernant les nouvelles graminées (moins consommatrices en eau) ; encore moins sont capable de parler d’évapotranspiration journalière, ou de donner des exemples d’opérations mécaniques nécessaires à l’épanouissement des gazons !
Pourtant ma grand-mère disait, il y a 50 ans, en cultivant son jardin « un binage égale 2 arrosages » ! Nos anciens connaissait parfaitement les bienfaits de travailler les sols pour obtenir de belles plantes.
En fait, il faut former nos golfeurs à « défendre » notre cause. Il n’est pas rare que dans un diner en ville, un golfeur ou un néo-golfeur ne soit la cible d’attaques de gens qui croient tout connaitre mieux que tout le monde ; aussitôt les clichés réapparaissent alors : le golf, sport de pollueurs, produits et engrais chimiques, sport qui consomme de l’eau à outrance…
Un golfeur formé ou informé sera à même de donner des éléments concrets et maîtrisés pour corriger les idées reçues et donner un vrai visage de nos golfs à la recherche d’une excellence en matière d’environnement. Chaque golfeur doit devenir un véritable soutien pour notre filière.
GP : Le contrat de progrès qui a été signé vendredi entre la ffgolf et l’agence de l’eau Adour Garonne est-il déclinable ailleurs ?
Le contrat de progrès signé vendredi sera sans doute décliné dans les autres agences de l’eau en France. Les enjeux sont très importants notamment en Bretagne, dans le sud-est en Languedoc-Roussillon… Il existe déjà un contrat de ce type signé pour l’agence de l’eau Seine Normandie. Nous sommes sur la bonne voie.